Un plan pour relancer l’économie

Présenté le 3 septembre dernier par le Premier Ministre, le plan France Relance prévoit une enveloppe de 100 milliards sur trois ans pour soutenir l’activité économique et orienter la reprise vers l’innovation et la transition écologique. Avec des opportunités intéressantes pour les entreprises du territoire, à condition de se mobiliser rapidement. 

A crise sanitaire et économique sans précédent, réponse inédite. Telles peuvent être qualifiées les sommes considérables mises sur la table par le gouvernement pour faire face aux conséquences économiques de la pandémie de Covid-19. Après avoir annoncé 470 milliards d’euros pour des mesures d’urgence en 2020 (chômage partiel, report du paiement des loyers et des factures, prêts garantis par l’Etat…), le gouvernement a présenté le 3 septembre le plan « France Relance », un programme de 100 milliards d’euros pour la refondation économique, sociale et écologique du pays, avec un objectif affiché : « bâtir la France de 2030 ». Comme le détaillait Hervé Jonathan, sous-préfet des Pyrénées Atlantiques lors d’une réunion de présentation du plan, celui-ci vise à « profiter de la relance pour accélérer la transformation de l’économie afin de répondre aux grands enjeux de notre société : le changement climatique, en réduisant drastiquement l’empreinte carbone des activités, la souveraineté économique et industrielle, notamment sur la production de biens stratégiques, et l’inclusion sociale, en particulier des jeunes ». 

3 piliers, 70 mesures, 100 milliards

Concrètement, le plan s’articule autour de trois volets : l’écologie (30 milliards pour la décarbonation de l’industrie, les mobilités vertes, la rénovation énergétique des bâtiments, les technologies vertes, la transition écologique), la compétitivité des entreprises (35 milliards pour soutenir l’innovation et la souveraineté technologiques, baisser les impôts de production et renforcer les fonds propres des TPE, PME et ETI), et enfin la cohésion (35 milliards pour la santé, la recherche, l’emploi, la formation, l’insertion des jeunes et l’inclusion numérique des territoires). Le monde économique n’est pas le seul concerné par le plan de relance, certaines mesures ciblant les collectivités et établissements publics, comme le soutien aux collectivités territoriales (4,1 milliards) ou le Ségur de la Santé (6 milliards). Mais les entreprises restent les principaux bénéficiaires d’un plan dont 78% des fonds sont axés sur l’investissement, à travers la baisse de la fiscalité des entreprises (20 milliards), le renforcement des fonds propres (3 milliards) et les divers appels à projets et autres soutiens à l’investissement (55 milliards). Et plusieurs mesures ciblent plus spécifiquement les TPE et PME. Par exemple, le volet écologie prévoit un guichet unique géré par l’ADEME pour accompagner les TPE dans leur projet de décarbonation, avec une enveloppe de 200 millions d’euros. De même 400 millions d’euros sont prévus pour la numérisation à grande échelle des TPE, PME et ETI. 

Des opportunités pour le territoire

Si une partie du plan de relance concerne l’ensemble des secteurs, via les mesures fiscales ou les dispositifs de soutien (prêt garantis par l’Etat, aides à l’emploi, activité partielle…), d’autres mesures ciblent particulièrement des secteurs stratégiques du Pays Basque. L’aéronautique, le numérique et la Tech, le bâtiment et la construction ou encore le tourisme bénéficient en effet d’intéressants leviers à travers les appels à projets. « Plusieurs entreprises de l’aéronautique se sont déjà portées candidates sur des projets. Mais d’autres volets concernent toutes les entreprises industrielles, avec des subventions conséquentes. Il y a là des opportunités à saisir et il est important que les entreprises s’en emparent. Mais pour cela, il faut aller très vite », note Nicolas Roche, Délégué régional Aquitaine Sud de BPI France. Les autorités exhortent les entreprises à se mobiliser au plus tôt pour se porter candidats. L’Ademe, la Dirrecte ou BPI France en sont les interlocuteurs selon les projets.  

Entretien avec Jacques Le Cacheux, Professeur agrégé des Universités, Economie, à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour

En quoi ce plan est il inédit ? 

Par l’ampleur de ses financements. On n’a jamais mis autant d’argent sur une période aussi courte dans des programmes d’investissement ambitieux, avec des objectifs clairs en matière de transition. Ce plan est très différent de celui de 2008. Il s’agit d’un plan de soutien à l’économie, avec une part « urgente » pour fournir des liquidités aux entreprises en difficultés, et une autre part consacrée à réorienter le redémarrage de l’économie. Les baisses d’impôts, qui sont pérennes, les aides à l’investissement, la recapitalisation via les prêts participatifs sont prévus pour aider les entreprises à passer la période actuelle. Mais une part significative est fléchée vers la transition écologique et énergétique, alors que la commission européenne a fixé à -55% la baisse des émissions de GES d’ici 2030. 

Ce plan peut il accélérer la transition écologique ? 

C’est là l’objectif dans les deux ans à venir. Mais cela suppose que les entreprises aient dans les tiroirs des projets qui répondent aux orientations affichées. C’est le cas dans l’aéronautique, avec Airbus qui annonce l’avion a hydrogène en 2030. Le secteur est confronté depuis quelques temps déjà à une remise en cause. La crise ne fait qu’accélérer cette mutation en offrant l’opportunité de développer de nouvelles technologies. 

Cela fait déjà quelques années que l’on parle de transition écologique et certaines entreprises sont prêtes depuis un moment. S’il y a des financements importants, cela peut faire une vraie différence. Reste à savoir comment sera opérée la sélectivité des projets et les relations entre l’Etat et les entreprises. Mais le changement climatique, qui est plus rapide que prévu, impose de réaliser les investissements nécessaires dans des délais très brefs. Tout se joue dans cette décennie. 

Ce plan suffira t-il ? 

Le Plan de relance a été conçu au printemps, dans l’idée que la crise sanitaire serait finie. Or, nous faisons face aujourd’hui à une 2e vague. La crise économique n’est pas finie et le couvre feu dans les métropoles va avoir des effets ravageurs sur de nombreux  secteurs 

Et on ne sait pas quelle va être l’efficacité des mesures prises. D’un autre côté, nous avons besoin d’outils pour que les entreprises aient un horizon. Il est important que le parlement en débatte et que le plan soit lancé, d’autant que sa mise en œuvre prendra quelques mois. Partout en Europe, les gouvernements ont décidé d’intervenir massivement dans l’économie, avec des conditions de financement favorables. L’Etat Français emprunte aujourd’hui à des taux négatifs et l’action de la BCE montre que ces taux d’intérêt devraient se maintenir à un niveau très bas. Il y a là des opportunités pour l’Etat d’agir en planificateur, en stratège. Les objectifs climatiques imposent aujourd’hui des changements significatifs en peu de temps. La crise actuelle a précipité cette nécessaire évolution. 

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